RÉCIT DE VOYAGE ET D'ENSEIGNEMENT À PARIS
Dès la clôture de la retraite bouddhique à Berlin, notre groupe de bhikkhunis - Nhu Minh, Nhu Sen et moi-même - a pris le lendemain, 19 mai, l'avion pour Paris. Le 20 mai au matin, la retraite de courte durée y a commencé, durant 3 jours, samedi, dimanche et lundi. Ce stage était également bilingue français-vietnamien avec la présence de quelques francophones qui suivaient en direct l’enseignement à l’aide des écouteurs personnels. Ainsi la traduction ne gênait personne, et le stage se déroulait normalement comme d'habitude. Cette année, la participation à Paris n’était pas aussi nombreuse que l'année dernière, étaient présents uniquement les méditants de Paris. La Sangha de Toulouse venait de terminer sa retraite, seul Tâm Minh s’est déplacé pour participer à la traduction lorsque le besoin se faisait sentir. Et comme une retraite est prévue à Stuttgart en août, ses méditants ne sont pas venus non plus à Paris cette fois-ci.
La plupart des méditants parisiens sont des anciens, avec quelques nouveaux pratiquants. L'ambiance était chaleureuse et conviviale. Je parle d’anciens car la Sangha de Paris a été créée très tôt, il y a déjà 20 ans, tout comme celle de Stuttgart. Par conséquent, la plupart des méditants ne venaient ici que pour rencontrer leur enseignant et leurs amis. Ils maîtrisaient déjà les enseignements et la pratique de la méditation. Lorsqu'on leur demandait par exemple d’ouvrir les yeux et de voir clairement l'objet sans le nommer, avec l’esprit calme, ils ont tous rapporté qu'ils pouvaient le faire avec succès. Ils avaient donc une solide expérience de la maîtrise du mental à partir de laquelle, s'ils pratiquaient régulièrement, leur esprit deviendrait encore plus silencieux.
La sagesse réside justement dans le fait de savoir comment est notre esprit à ce moment-là. Et aussi de savoir le décrire correctement.
Cette méthode s’intitule "Ne pas nommer l'objet" . Autrefois, notre Maître le considérait comme une pratique menant à l'expérience d'un esprit calme (Samatha) puis d'un esprit stable (Samādhi). Vu son importance, cette technique constitue un étalon pour jauger la solidité de notre expérience de la connaissance sans parole.
Une fois cette expérience, ne pas nommer l'objet, acquise, nous devons continuer à méditer en vue de réaliser plus de résultats merveilleux.
Lorsque nous "ne nommons pas l'objet", il n’y a aucune intention mauvaise ou malsaine dans notre esprit, alors les 5 préceptes laïcs seront pleinement respectés, ce qui correspond à une conduite éthique et pure.
À ce moment-là, nous voyons l'objet clairement et objectivement, c'est-à-dire son état à l'instant "t". Donc la vision "sans nommer l’objet", c’est aussi la vision de l’objet "tel que il est réellement". Il s’agit également de la sagesse, de l'esprit objectif.
Lorsque nous "ne nommons pas l'objet", c'est-à-dire que la connaissance est complètement nue à ce moment-là, cela correspond à l'enseignement du Bouddha : "Ne pas saisir un aspect, ne pas saisir un détail".
Et "ne pas nommer l'objet", c'est-à-dire ne générer aucune pensée au contact de l'extérieur, c'est aussi "Garder le non-mental devant toute chose". C'est également être dans le Samādhi dans le quotidien.
Lorsque nous vivons en société, nous établissons constamment des contacts avec l’extérieur à travers nos yeux, nos oreilles, notre nez, notre langue et notre corps, et si nous ne nommons aucunement les objets, si nous ne manifestons aucune intention à leur égard, comment pourrons-nous les étiqueter, les juger et les critiquer? Alors la pensée deviendra pure, tout comme les paroles et les actions. Si nous n’émettons aucune intention, si nous ne nous accrochons à rien, notre esprit sera dans un état de non-attachement. Il sera objectif, il sera serein, il sera libéré à ce moment-là.
Mes chers amis méditants, vous avez juste besoin de ce chemin simple qui est la barque de la sagesse nous permettant de passer sur l’autre rive, la rive de la plénitude absolue. Lorsque nous "ne nommons pas l'objet", nous nous embarquons immédiatement sur la barque de la sagesse, sans fond, car le mental est vide, le soi est vide et tout est vacuité. En fait il n'y aura plus de barque, il n'y aura plus de passager, nous reviendrons à nous-mêmes, au mental originel qui est naturellement pur, silencieux et illuminé comme depuis toujours.
Monastère principal, le 09/07/2023
Triet Nhu
Source du texte (en vietnamien) : https://www.tanhkhong.org/p1184a3785/ni-su-triet-nhu-ky-su-chuyen-du-hoa-paris-5-2023