VENIR POUR REPARTIR
Ce matin, en ouvrant les courriels, j'ai trouvé un article traduit en allemand, intitulé "Dans la zone brumeuse". Le traducteur, un méditant de Śūnyatā, m'a informé qu'il s'agissait d'une mise à jour de l'ancienne version publiée sur le site web. Il y a si longtemps que j'ai écrit ce texte que je ne me souviens plus de son contenu. Qu'y a-t-il de si intéressant pour que ce méditant le relise toujours pour le mettre à jour ? Avec curiosité, j'ai cherché cet article qui pourrait faire partie de la série "Chantant au milieu du ciel". Ah! le voici! C'est le 35e. Je le relis. Oh! c'est le pays des merveilles, cette région brumeuse. Puis j'ai jeté un coup d'œil rapide au numéro 33, "Printemps". Eh bien! Qu'ai-je écrit là sous un titre aussi court ? En lisant jusqu'à la fin du texte, sous le coup de l'émotion, les souvenirs du Maître jaillissent. En bas à droite de l'ordinateur portable s'affiche le 13 mars. C'est l'anniversaire de notre Maître.
Le printemps 1929 a vu son arrivée dans notre monde. Le printemps 1982 fut une bénédiction pour lui, qui voyait clairement le chemin à suivre. En hiver 2019, il nous a quittés.
Le printemps est de retour. Les fleurs de Maï, Ochna integerrima, et les Sakura, fleurs de cerisier, sont en début de floraison. Nous savons que la nature se dirige vers le printemps. Il n'y a rien de plus beau que ces premières fleurs de la saison. Les pétales rose pâle sont si doux, fragiles et translucides sous l'effet de la lumière du soleil. Qui pourrait les toucher sans craindre de les blesser ? Leur parfum se répand légèrement. Les fleurs en croissance entrouvrent les couleurs rosées, cristallines et cramoisies en s'élançant vers le ciel bleu pour accueillir la lumière du jour.
Lorsque la lumière chaude du soleil apparaît, le vent froid se transforme en une brise fraîche. Quand le printemps ensoleillé revient, l'hiver froid s'en va. L'hiver doit disparaître pour que le printemps arrive. Les fleurs s'épanouissent, puis se fanent au retour de l'hiver. Les jonquilles fleurissent dans le vent d'hiver. Puis elles pâlissent et meurent à côté des branches de cerisiers qui brillent de bourgeons rosés et blanchâtres. Mais les fleurs de cette année sont-elles les mêmes que celles de l'année dernière ? Et ce soleil de printemps ressemble-t-il à celui d’autrefois ?
Le temps écoulé est-il jamais revenu ? La vie continue de s'écouler. Tout va de l'avant, toujours de l'avant. Se sont-ils jamais arrêtés ? Sont-ils déjà revenus à l'état initial ? C'est le fonctionnement le plus naturel. Le train de la vie continue d'avancer vers l'infini. Il en va de même pour nous. Nous sommes comme des écumes blanches au bord de la mer. Les vagues de la mer tapent innocemment sur le sable et génèrent ces écumes qui apparaissent et disparaissent continuellement. Notre vie est semblable à ces écumes, qui existent et disparaissent rapidement. Le Bouddha a dit : "La vie humaine est semblable à une écume, à la lumière d'un coucher de soleil tardif, à un tronc de bananier, à un éclair, à un rêve et à un tour de prestidigitation".
Sachant cela, ne soyez pas tantôt tristes, tantôt joyeux. Pourquoi sommes-nous heureux quand nous nous réunissons et malheureux quand nous partons ? En se voyant, il faut savoir que le temps de la séparation viendra certainement. Quand quelque chose naît, il faut savoir qu'il disparaîtra un jour. Les fleurs s'épanouissent, puis se fanent. C'est pourquoi nous apprécions le moment où nous profitons des fleurs et où nous chérissons notre vie et celle des autres êtres sensibles.
Cependant, ce matin, sous la chaude lumière du soleil, profitant des fleurs de printemps, comment se fait-il que les yeux de quelqu'un soient en larmes ?
Bhikkhuni Thích Nữ Triệt Như
Monastère Principal, 13 mars 2024
Traduit en français par Marc Giang, relu par Tuệ Tỉnh.
Lien vers l'article en vietnamien : https://tanhkhong.org/p105a4101/triet-nhu-tieng-hat-giua-troi-bai-47