RÉCIT DE VOYAGE À JUZIERS, FRANCE
MAI - 2025
Après les retraites méditatives en Allemagne, le lundi 19 mai, Mme Minh An nous a ramenés à l'aéroport de Francfort avec Thay Quang Dung pour prendre l'avion pour Paris. Le trajet étant assez long (264 kilomètres), nous avons dû partir tôt. La veille au soir, Mme Minh Hue nous avait appelés pour nous informer qu'elle était rétablie et qu'elle nous attendrait à l'aéroport de Francfort pour nous dire au revoir. Bien que j'aie répété à plusieurs reprises qu'une simple conversation téléphonique suffisait, Mme Minh Hue a insisté pour que nous nous rencontrions à l'aéroport.
Juste à l’entrée de l'aéroport, en m'enregistrant et en me retournant, j'ai vu arriver Mme Minh Hue et M. Tuong Bach. Comme il nous restait encore beaucoup de temps, nous avons trouvé un endroit où nous asseoir et bavarder, puis ils nous ont invités à déjeuner dans un fast-food. M. Tuong Bach a offert une de ses œuvres, "Le Parfum du Santal", au Maître Quang Dung, que j'avais reçue il y a quelques années. J'ai souri, il n'avait pas de livres pour moi ? Il a fait également un sourire, a sorti un livre de son sac, l'a signé et me l'a donné : "Qui a tissé la toile du ciel?". Puis il m'a dit : "Je sais que vous aimez la physique." Il était temps de se dire au revoir, et Mme Minh Hue l'a fait avec un sourire. Nous nous sommes rencontrées aujourd'hui, même si nous n'avions pas beaucoup de temps, nous sommes quand même venus, qui sait ce que demain nous réserve ? Oui, même si personne n'avait eu le temps de dire grand-chose, c'était suffisant.
Une fois arrivés à l'aéroport Charles-de-Gaulle, M. Tam Hy est venu nous chercher pour nous emmener à Juziers, à plus de 50 km de là. Juziers est une petite ville reliée à Paris par la Seine, qui traverse la capitale et passe derrière la maison de Tam Pho. Il s'agit d'une résidence secondaire occupée uniquement le week-end, car Tam Pho et Kiem Lien travaillent toujours à Paris. La maison compte 5 chambres, ce qui est insuffisant pour organiser une retraite méditative, aussi Tam Pho n'a-t-il invité que les amis méditants de Sunyata Paris à passer la journée de vendredi avec nous.
La Seine entoure cette petite île qui porte le nom de "L'Île Verte" en français. Lorsque nous sommes arrivés près de la rive, nous avons dû laisser la voiture sur le bord de la route. À notre descente de voiture avec nos bagages, un petit bateau transportant environ dix personnes nous a fait traverser la rivière en cinq minutes. Tam Pho est arrivé sur le quai pour nous accueillir. Il y avait un petit véhicule, comme ceux des stations balnéaires, avec une conductrice française assez âgée qui m’a conduit avec tous nos bagages jusqu'à la maison de Tam Pho. Pendant ce temps, Maître Quang Dung et M. Tam Hy ont fait le trajet à pied. Tam Pho est arrivé le premier à vélo pour ouvrir la porte de sa maison et accueillir les invités. Lorsque nous sommes entrés dans la maison, Mme Lan Huong était déjà là.
J'y ai passé trois jours de détente totale, assise dans la "cabane flottante", à regarder la rivière, l'eau, le ciel et les nuages. Que pourrait-il y avoir de mieux au monde? Cette pièce est d'ailleurs comme un pont, comme le pont d'un bateau. Le plancher en bois est posé sur l'eau comme une maison sur pilotis, entouré de portes vitrées, et équipé d'un chauffage et d'une cheminée ou d'un barbecue à l'extérieur.
Trois jours assise à contempler la rivière, calme et ondulante. De temps à autre, un cargo y entrait ; parfois, un navire de croisière de deux ponts seulement paraissait plus luxueux. Les navires à la file indienne, en entrant comme en sortant... La rivière n'était pas large, juste assez pour qu'un navire puisse descendre le courant et qu’un autre puisse remonter. À chaque passage, l'eau ondulait, s'inclinant le long de la proue labourant la surface de la rivière. Les vagues se formaient, grossissaient, semblant se diriger vers le rivage, puis retombaient et se répandaient dans la rivière, devenant de plus en plus petites ; finalement, les deux vagues entrantes et sortantes se rencontraient et se confondaient, il était impossible de distinguer celle qui entrait de celle qui sortait. La surface de la rivière redevenait calme et ondulante, reflétant les pins de l'autre rive.
La rivière est plus belle lorsque les pins scintillent dans l'eau. Mais voir leurs ombres se refléter dans l'eau est encore plus beau. Chaque matin, un cygne glisse tranquillement sur l'eau, sa couleur d'un blanc immaculé se reflétant clairement entre la rivière et les arbres verts et frais. Le cygne nage près de la maison, et Tam Pho y laisse tomber quelques petits morceaux de pain. Il mange, s'attarde un moment, puis s'éloigne à nouveau. Il nage seul, silencieux, tranquille, sans fournir le moindre effort, mais il glisse très vite sur l'eau. Lisse et discret, il ne laisse aucune trace de son passage sur la rivière.
Cela me rappelle des versets du maître Huong Hai, un maître zen vietnamien :
“Les hirondelles volent dans le ciel.
Au fond de l'eau, leur ombre apparaît.
Les hirondelles n'ont pas l'intention de laisser de trace.
L'eau n'a pas la moindre intention de retenir l'ombre.”
La rivière, à l'instar de la nature, est toujours ouverte ; chacun peut y aller et venir à sa guise. L'eau ondule un instant, puis s'écoule, laissant derrière elle le silence, le frémissement et la paix. Notre mental devrait être ainsi. Les événements de la vie viennent et s'en vont.
Dans le jardin, un cerisier est en pleine saison. Il est si grand qu'il faut une échelle pour en cueillir les fruits. Vendredi, de nombreux méditants parisiens sont venus. Le matin, ils se sont réunis dans le salon et j'ai projeté un diaporama que j'avais préparé pendant les temps libres de mon séjour à Stuttgart. Il s'agit d'un sujet de synthèse intitulé "Le processus de reconnaissance instantanée du mental vrai", et comment devient-il ensuite le "mental errant?"
Après le cours théorique, les méditants se rendent derrière la maison, observent la rivière, prennent des photos et poursuivent la cueillette des cerises.
Dans l'après-midi, les méditants parisiens nous ont dit au revoir et sont partis, en emportant quelques cerises en guise de cadeau. Le lendemain, Maître Quang Dung et moi sommes retournés au Centre de méditation Sunyata Paris pour préparer notre retour aux États-Unis, avec la promesse de Tam Pho et Kiem Lien qu'ils seraient prêts à nous accueillir dès que nous souhaiterions revenir nous reposer chez eux.
Monastère Principal, le 04/06/2025
Triet Nhu
Texte source (en vietnamien) : https://www.tanhkhong.org/p1184a4782/ky-su-chuyen-di-juziers-phap
Traduit en français par Marc Giang, relu par Bùi Phương Trâm de Sunyata Paris.